Remarques sur un idéologème – 3. Usages des mots et biais cognitifs

Remarques sur un idéologème – 3. Usages des mots et biais cognitifs

Détour par le « système 1 » du Pr Kahneman. Le langage ne peut être exempt de « stéréotypes », mais la frénésie policière qui s’est emparée des pouvoirs publics pour l’en expurger entend faire comme si…

Dans la vie, celle que l’État et ses appareils s’emploient à réguler mais échouent à contrôler tout à fait, la plupart des idées que nous mobilisons spontanément, dans les gestes de tous les jours, sont du même ordre que le préjugé ou le stéréotype. Sans elles, nous ne saurions, nous ne pourrions pas vivre.

La raison raisonnante, la vérité académique (qui souvent prête à rire), la techno-science brevetée, ce n’est pas avec ça que nous vivons, de l’instant où nous posons le pied par terre au saut du lit et jusqu’au moment d’y retourner pour passer le manche à l’inconscient, seul maître de nos rêves.

Ce qui nous gouverne, la plupart du temps de notre veille consciente, c’est un régime où des schèmes plus ou moins conscients nous dirigent en nous épargnant l’effort d’une pensée analytique, d’une pensée trop lente pour nos besoins immédiats, qui s’enchaînent à un rythme auquel elle ne saurait répondre. Ce qui nous gouverne, c’est le règne des raccourcis mentaux, auquel touche la sociologie avec les concepts d’ethos ou d’habitus, la psychologie comportementale ou, assis sur elle, les behavioral economics. C’est le « système 1 » de Daniel Kahneman[1], le fast thinking, le règne des heuristics (raccourcis mentaux), des automatismes, des intuitions nées de l’habitus ou de biais cognitifs. Système mental qui porte à l’erreur, sans doute, surtout dans les domaines et les disciplines contre-intuitives – comme la statistique –, mais qui s’avère en d’autres cas plus efficace qu’une réflexion laborieuse et elle aussi sujette à l’erreur. Lire la suite